Le contournement de Namur et l’accès facilité pour les Liégeois et les Hennuyers au pôle universitaire de Louvain-la-Neuve ne sont-ils pas des facteurs de frein substantiels à la fois idéologiques et sous-régionaux susceptibles d’unir dans l’opposition de puissants lobbys des trois provinces ?

Ces réflexes sont sans doute possibles. Ils reposeraient cependant sur une mauvaise compréhension du projet, tant dans sa philosophie que dans ses conséquences pratiques.

Au niveau de la philosophie, il s’agit de densifier le maillage du réseau ferré wallon de manière à ce que cela profite à tout le monde et ne nuise à personne. L’idée est bien de faire de la nouvelle ligne un levier pour augmenter l’attractivité, la rentabilité et la pérennité du réseau wallon dans son ensemble. Une transbrabançonne ferroviaire aurait en effet des répercussions positives sur les autres provinces, effets dont dépend d’ailleurs le succès du projet. Un de ses points forts consiste précisément dans la diffusion sur l’ensemble de la région des effets bénéfiques de la relative prospérité du Brabant wallon tout en gardant sous contrôle les conséquences négatives d’un développement territorial aujourd’hui largement anarchique. Dans le langage des économistes, il s’agit de tirer un meilleur parti des complémentarités entre des sous-régions et de les renforcer là où c’est souhaitable, par exemple en améliorant l’interconnexion des différents pôles universitaires, tout en limitant les externalités négatives d’un développement économique produisant un émiettement social et territorial avancé.

En pratique, les prolongements naturels de la nouvelle liaison vers Liège et Verviers d’une part et vers Mons et Tournai d’autre part assurent également une meilleure accessibilité des cités mosanes et du Hainaut occidental. Elle permet de surcroît des relations intéressantes à l’intérieur de ces provinces. Il serait ainsi possible de créer, dans le prolongement de la transbrabançnne, une liaison ferroviaire directe entre la Hesbaye et la vallée de la Vesdre, depuis Hannut jusque Verviers et Eupen. Plus généralement, les nouveaux pôles de correspondances multiplient les destinations accessibles, y compris depuis Namur via Ottignies. Cela rapprochera par exemple considérablement l’ouest du Brabant wallon de Namur, Liège et le Luxembourg.

En ce qui concerne plus précisément le « contournement » de Namur, il s’agit là aussi d’une mauvaise lecture. Tout d’abord Namur profitera de la transbrabançonne via la correspondance à Ottignies. Namur et toute la dorsale wallonne profiteraient également d’une séparation des couloirs fret Nord-Sud et Est-Ouest. Surtout, contrairement à d’autres projets plus ou moins fantaisistes (dorsale wallonne bis le long de l’autoroute de Wallonie, liaison souterraine sous l’aéroport de Gosselies), la transbrabançonne ne duplique aucune infrastructure existante (ce qui alourdit considérablement les coûts d’exploitation sans amélioration globale de l’offre de transport). Elle en démultiplie au contraire les possibilités. Aucune personne sensée n’a jamais soutenu que l’importance du nœud ferroviaire de Malines nuisait à celui de Louvain ! Dans un réseau, chacun profite des connexions établies ailleurs, pour autant, et c’est essentiel, que les différents nodes soient eux-mêmes inter-connectés. La transbrabançonne s’inscrit précisément dans cette optique.